La langue française regorge d’expressions imagées pour décrire les sentiments et les caractères des personnes. Parmi elles, il en est une qui évoque la fierté excessive et mal fondée : être « fier comme Artaban ». Mais qui était donc cet Artaban dont le nom est devenu synonyme de vanité ? Quelle est l’histoire de cette expression ? Quand et comment l’utiliser ? Voici quelques éléments de réponse.
Artaban, un personnage de roman du XVIIe siècle
Pour comprendre l’origine de cette expression, il faut remonter au XVIIe siècle, à l’époque du Grand Siècle et du classicisme littéraire. C’est à cette période qu’un écrivain français, François Hédelin, plus connu sous le nom de Gautier de Costes de La Calprenède, publie un roman historique intitulé Cléopâtre. Ce roman, qui compte douze volumes et plus de quatre mille pages, raconte la vie de la célèbre reine d’Égypte et ses relations avec les généraux romains Jules César et Marc Antoine.
Parmi les nombreux personnages qui peuplent cette épopée, il y en a un qui se distingue par son orgueil démesuré : Artaban. Artaban est un prince parthe, c’est-à-dire un souverain d’un royaume situé entre l’Iran et l’Irak actuels. Il est amoureux de Cléopâtre, mais celle-ci le repousse. Il devient alors son ennemi juré et cherche à la combattre par tous les moyens. Il se vante sans cesse de sa bravoure, de sa beauté, de sa richesse, mais il accumule les échecs et les humiliations. Il finit par être tué par Marc Antoine lors d’une bataille navale.
Une expression popularisée par Marivaux au XVIIIe siècle
Le roman de La Calprenède connaît un grand succès à son époque, mais il est aussi critiqué par certains auteurs qui lui reprochent son style ampoulé, ses intrigues invraisemblables et ses personnages outranciers. Parmi ces critiques, il y a Nicolas Boileau, le célèbre poète et théoricien du classicisme, qui se moque dans son Art poétique des héros de La Calprenède, qu’il qualifie d' »Artabans ». Il fait ainsi référence au personnage le plus arrogant et le plus ridicule du roman : Artaban.
C’est ainsi que le nom de ce prince parthe devient peu à peu synonyme de fierté mal placée. L’expression « fier comme Artaban » apparaît pour la première fois en 1734, dans un autre roman : La Vie de Marianne, écrit par Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux. Ce roman raconte les aventures d’une jeune orpheline qui cherche à découvrir ses origines et à trouver l’amour.
Dans le troisième tome, Marianne rencontre un jeune homme qui se prétend comte et qui se montre très prétentieux. Elle le décrit ainsi : « Il était fier comme Artaban ; il avait une mine superbe ; il parlait avec emphase ; il marchait avec majesté ; il avait des manières nobles ; il était magnifiquement habillé ; il portait une épée dont la garde était d’or ; il avait une perruque blonde qui lui tombait sur les épaules ; il avait des gants parfumés ; il avait des bas de soie ; il avait des souliers à talons rouges ; il avait tout ce qu’il fallait pour être un grand seigneur. » L’expression « fier comme Artaban » se répand alors dans le langage courant et devient une façon ironique de qualifier quelqu’un qui se croit supérieur aux autres sans raison.
Comment utiliser l’expression « fier comme Artaban » aujourd’hui ?
Aujourd’hui, l’expression « fier comme Artaban » est toujours utilisée pour désigner une personne qui fait preuve d’une fierté excessive et infondée. Elle peut avoir une connotation négative ou humoristique, selon le contexte et le ton employé. Elle peut s’appliquer à des situations variées, comme par exemple :
- Quelqu’un qui se vante de ses exploits sans modestie : « Il a réussi son examen et il est fier comme Artaban, il n’arrête pas de nous le répéter. »
- Quelqu’un qui se croit plus important qu’il ne l’est : « Il se prend pour le chef et il est fier comme Artaban, mais il ne sait même pas faire son travail correctement. »
- Quelqu’un qui se réjouit d’une réussite insignifiante : « Il a gagné au loto et il est fier comme Artaban, mais il n’a touché que dix euros. »
- Quelqu’un qui affiche une confiance excessive en soi : « Il est parti draguer la plus belle fille de la soirée et il était fier comme Artaban, mais il s’est pris un râteau. »
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Conclusion
Nous avons vu que l’expression « fier comme Artaban » vient d’un personnage de roman du XVIIe siècle, qui incarnait la fierté mal placée et la vanité ridicule. Nous avons vu aussi comment cette expression a été popularisée par Marivaux au XVIIIe siècle, et comment elle est encore utilisée aujourd’hui pour qualifier quelqu’un qui se croit supérieur aux autres sans raison. L’expression « fier comme Artaban » est donc une façon amusante et ironique de dénoncer l’orgueil démesuré de certaines personnes.